samedi 30 avril 2011

Le clodo du quartier St Jean

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  Vous le voyez, mais il semble ne voir personne. Il est dans son monde. Un monde où vous n’avez pas de place. Le monde effrayant d’une solitude proche de la folie. Où est-il donc lorsqu’il regarde dans le vide et soliloque à mi-voix ? Pense-t-il à sa vie d'avant, du temps où il n'était pas clodo, lorsqu'il s'appelait Pierre ou Paul ? Se souvient-il d'avoir aimé et avoir été aimé ? Et qu'un jour sans doute, une femme lui a murmuré des mots d'amour à l'oreille ? 

Elle ne sait pas où il va, elle ne sait pas où il dort. Quand elle l'aperçoit, elle se demande toujours s'il y aura une prochaine fois. Mais il est là, fidèle au poste. Cette année il est réapparu après l'hiver avec une canne. Été comme hiver, il porte un bonnet et un grand manteau gris et elle n’a jamais vu ses cheveux. Il ressemble à ces clodos d’autrefois, ceux pour qui on laissait la « part du pauvre ». Ce n'est pas un SDF comme les autres, comme on en trouve à Paris. Vous savez, celui qui a des sacs en plastique, celui à côté duquel vous vous asseyez, content d’avoir trouvé une place assise dans le métro bondé de 18h ? et dont vous vous relevez dès que la décence vous le permet, chassé par l’odeur insupportable que votre voisin dégage ? Non, ce clodo ne sent pas le vin. Un clodo sobre, cela existe ?

De temps en temps elle le voit prendre le soleil près de la cathédrale appréciant avec un bien-être un peu animal cette chaleur gratuite. Le dimanche des Rameaux, elle l’a aperçu sortant de l'église, une branche de buis à la main. Dans son cerveau embrumé se souvenait-il d’une enfance sage et des rites d’une famille unie et aimante ? Ou tout simplement était-il venu se joindre à la foule pour avoir un peu de chaleur humaine ? 

 Il apparaît et disparaît. Un jour il disparaîtra pour de bon et on dira : « Tiens cela fait un bout de temps qu'on ne l'a pas vu ». C'est un clodo. Pierre ou Paul n'est plus là depuis longtemps.

 

 

 

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mercredi 27 avril 2011

Besançon, ma ville

 

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Comme le renard de l'histoire, ma ville a besoin d'être apprivoisée. Sa banlieue ressemble à toutes les banlieues, avec ses grandes enseignes, ses immeubles et ses voies rapides. Pour avoir une chance de la connaître, il vous faut vous arrêter, pénétrer dans la boucle du Doubs qui renferme son cœur, et aller le nez au vent, à pied ou à vélo. Là, seulement, vous aurez une chance de découvrir l’âme de ma ville.

Car ma ville ne se donne pas à n'importe qui, mais elle vous aimera si vous l’aimez. Vous serez séduit par sa douce pierre bicolore ivoire et bleutée. Vous admirerez ses hôtels particuliers des siècles passés, ses cours intérieures cachées, ses escaliers à cage ouverte. Vous découvrirez tout d’un coup, au détour d’une rue, un fronton ou une inscription, des détails qui vous charmeront. Des petits plus gratuits, telle cette charmante et romantique tourelle du bel hôtel Chassignet, du XVIe siècle, qui vous ravira. Ce sera une douceur en passant, comme un chocolat exquis qui fond dans la bouche ou encore un baiser évanescent reçu au clair de lune.

Vous continuerez au hasard et vos pas vous amèneront peut-être place de la Révolution, austère et minérale dans son classicisme sévère. Et si c'est un jour de beau temps, vous aurez peut être la chance d'entendre le champ d'un violon qui s'échappe des fenêtres du conservatoire. La raideur du lieu s'envolera et ce sera alors un moment de pur bonheur.

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dimanche 24 avril 2011

Ma copine Marie-Charlotte.

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Comme la princesse du conte, ma copine Marie-Charlotte veut être parfaite.

Alors, vite, vite, elle court. Elle court à l’école chercher les enfants. Pas de cantine, c’est un déjeuner maison qui attend ses trois chérubins. Mais vite, vite, c’est déjà l’heure de retourner en classe. 
Ma copine Marie-Charlotte a une silhouette de rêve mais traque le micro gramme de graisse qui s’est égaré sur son ventre tout plat. Alors vite, vite, elle court sur le tapis et fait des exercices. Puis, vite, vite, elle court au bureau faire sa part dans l’entreprise familiale. 
Ma copine Marie-Charlotte a aussi un swing de rêve. Avant son mariage c’était une excellente golfeuse. Elle veut retrouver son niveau. Alors, vite, vite, elle vient au practice et envoie des balles à 180m. 
Ma copine Marie-Charlotte aime cuisiner et recevoir mais il faut que ce soit parfait. Alors vite, vite, elle prend des cours et va sur internet. Mais là, patratras ! on ne peut faire vite, vite. Alors elle se lève plus tôt, et avant que les enfants ne soient debout, elle prend son temps et prépare des recettes compliquées qu’elle pourra finir vite, vite, le soir pendant le bain de ses chérubins.  

 Et ne croyez pas que ma copine Maire-Charlotte soit une personne triste et maussade. Elle est gaie et aime sa vie, qui va vite, vite. Elle ressemble à la jolie maman blonde des triplés de Nicole Lambert. Si vous la rencontrez, elle vous racontera en riant comment son petit dernier à mis dans la cheminée le sac à main (très) griffé d’une amie. Et comment vite, vite, elle a sorti des flammes ce qui pouvait être sauvé.

Mais mon portable sonne. C’est ma copine Marie-Charlotte. Vite, vite, elle m'attend.


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mercredi 20 avril 2011

La montre

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L’homme avait les yeux fixés sur sa montre. Mais il n’était pas en retard, non. Il n’était pas pressé non plus. Il marchait dans la rue en regardant à peine où il allait. Ses yeux revenaient sans cesse sur sa montre. Il ne regardait pas le cadran. Non, il regardait la montre, sa montre. Il en rêvait depuis longtemps. Avant de l’avoir au poignet, elle lui avait donné déjà beaucoup de bonheur. Il en connaissait tous les détails, toute l’histoire de sa fabrication. Car ce n’était pas n’importe quelle montre. C’était un objet compliqué fabriqué par une des dernières manufactures horlogères. Le modèle ne se faisait plus. On lui avait promis de la trouver, car c’était celle-là qu’il voulait, et pas une autre. Il attendait depuis longtemps. Tel un objet longuement convoité, il se l’était déjà approprié et elle lui appartenait déjà. C’était sa montre. Quelque fois, il regardait les devantures de bijoutier. Il craignait alors de lui être infidèle. Mais aucune ne trouvait grâce à ses yeux. La sienne était beaucoup mieux. Et puis un jour le téléphone a sonné, elle était enfin arrivée. Alors, il était vite allé la chercher. Il avait peur d’être déçu comme après un souhait enfin réalisé qui ne serait pas à la hauteur. Mais non, elle était aussi belle que prévue et ses complications étaient aussi compliquées que prévues. C’était un homme comblé.

L’homme avait les yeux fixés sur sa montre.

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dimanche 17 avril 2011

La femme qui fait des tartes

 

 

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« Tu comprends, ce n’est pas une femme qui fait des tartes, elle...» Elle entend l’expression et sursaute : le fait d’appartenir à cette catégorie impliquerait donc de déposer son cerveau à l’entrée de la cuisine ? et de s’essuyer le pieds dessus ? Mais l’expression est jolie, alors elle la retient. N’est-ce-pas infiniment plus charmant que femme au foyer ou même ménagère ?

 Ménagère... on pense ici au duo des Vamps, chacune serrant sous le bras un vieux cabas duquel dépasse un bouquet de poireaux chevelus. Tandis qu’une femme qui fait des tartes... cela évoque tellement de douces images, mmm... des souvenirs d’enfance et de promesses sucrées... ces moments à jamais disparus où gourmands et gourmets en herbe, vous espériez que la femme qui fait des tartes prenne en pitié vos yeux implorants, et vous donne la douceur attendue... cela évoque encore des réminiscences de dimanches, quelques fois un peu poussiéreux, telles ces réunions de famille où la femme qui fait des tartes apporte votre dessert favori, (pour lequel vous n’avez plus faim) « allez, tu trouveras bien encore une petite place ? » et dont, pour ne pas lui faire de peine, car, oui, vous l’aimez bien, vous vous servez généreusement (tout en vous promettant de courir deux fois plus longtemps le lendemain)…  mais encore, plus simplement et plus près de nous, cela n’évoque-t-il pas aussi la saveur d’un petit sablé qui sort du four ? ou la volupté fondante d’une mousse au chocolat ? ou encore l’exquise et irremplaçable perfection de la première tarte aux fraises de la saison ? Et c’est alors une vapeur de tendresse et de parfums qui, comme du sucre filé autour d’un croquembouche, vous entoure d’un nuage de plaisir sucré...

 Finalement, elle a bien envie d’être associée à cette image. Oui, elle est décidément une femme qui fait des tartes... ou plutôt, non, elle est aussi une femme qui fait des tartes.




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mercredi 13 avril 2011

Amours clandestines ?

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Lyon, parc de la Tête d’or.

 Ils sont assis tous les deux à une table. Elle, rose et blonde, fine et gracieuse dans une jolie robe d’été. Lui, cheveux grisonnants, élégant et raffiné, rasé de près et de frais. Indifférents au monde qui les entoure, leurs yeux se cherchent et les visages se tendent l’un vers l’autre. Il lui saisit la main et l’embrasse. Elle parle peu et l’écoute. Les jambes se frôlent. On sent chez eux l'hésitation mais aussi l’impatience des nouveaux couples dont l’avenir est incertain. On imagine qu’il cherche encore à la séduire et qu’elle va se rendre. La clientèle du restaurant est un peu âgée.  L'esprit vagabonde. Est-ce un nouvel amour qui est en train de naître sous ses yeux ? Ou ont-ils choisi le calme du lieu pour cacher des amours illégitimes ? Mais la femme a froid et ils changent de table pour aller au soleil. Celle qui les observe les perd de vue. Son addition arrive. En quittant le restaurant, elle passe devant leur table. Elle les abandonne en train de boire du rosé tout givré. 

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mercredi 6 avril 2011

Vroum... tuut... pouet... ou la réhabilitation des blonds

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Histoire d'un blond déterminé.

Dans la famille, on a coutume de dire qu'il y a les blonds et les bruns. A 23 ans, bientôt diplômé, et à la veille d'entrer dans le monde impitoyable du travail, notre blond en question se rend compte que le permis de conduire lui fera bientôt cruellement défaut. De plus, il réalise aussi que cette vie d'oisiveté vaguement studieuse va cesser et que le temps lui manquera bientôt pour l'apprentissage obligatoire de ce permis. 

En novembre 2010, il prend donc les choses en main. Il franchit toutes les étapes et le vendredi 25 février 2011 se soumet à l'épreuve de conduite finale... Résultat par courrier. Il faut attendre. Après l'examen, au fil des heures, il semble que notre blond préféré ait de plus en plus mal conduit... dimanche soir, il se voit déjà réduit à l'utilisation du vélo pour la vie. Alors, l'aura ? L’aura pas ? Le suspense est interminable... C'est long, un we lorsqu'on attend... Ce qu'il ignore, c'est que nous, nous savons… niak, niak... mais ce n'est pas certain à 100% et nous ne pouvons rien dire. Lundi, le courrier tant attendu est distribué et... rien pour lui ! Raaaagh ! il va mourir d'angoisse... est-ce envoyé par erreur à une ancienne adresse ? et avec lui le papier rose ? Non, non, le dossier est bien dans sa ville. Mardi : l'enveloppe est là... tin tin tin tin ! Le coeur bat au moment d'ouvrir. Yeeess ! You made it, yogi !

Petite morale de l'histoire : désordonnés, nos blonds ? Schtroumpfs coquets nos blonds ? Pas sûrs d'eux nos blonds ? Obstinés jusqu'aux harcèlement, nos blonds ? Oui, oui, sans doute mais lorsqu'ils veulent quelque chose, nos blonds, ils en prennent les moyens... code obtenu du premier coup avec une faute (ok, il sait apprendre !) et permis en poche après deux mois de conduite. Respect et bravo.

Une blonde...

Heu... j'y prête ou j'y prête pas, ma belle auto rouge ? Il sait vraiment conduire ?! 

mardi 5 avril 2011

Un week end d'avril à Paris

 

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C’est l'été tout d'un coup. Samedi, un déjeuner s'organise à une des terrasses du moment de la capitale. Le dôme des Invalides brille sous le soleil. Devant le restaurant, Ferrari, Porsche, Aston-Martin et autres voitures d'exception se bousculent et suscitent des coups d'œil faussement indifférents et blasés. Un jeune garçon prend des photos et son franc émerveillement devant ces belles mécaniques est rafraichissant.
Le temps s’étire paresseusement. Il fait trop beau pour ne pas en profiter, la culture et les musées attendront. Une flânerie sans but les conduit à St Germain. Jambes nues et décolletés ont fait leur apparition. Certains passants ont oublié de regarder le ciel avant de sortir et souffrent sous leur pull et écharpe. Les parisiens insouciants s'affolent dans les boutiques, la rue des St Pères est en effervescence. Tod's, Sandro, Paul&Joe et Jilly Sanders ne désemplissent pas. Grisaille de l'hiver, crise et Japon sont oubliés tout d’un coup. Au coin du boulevard St Germain, une femme mange une glace italienne en écoutant un orchestre de rue.
Mais dimanche, la température baisse de dix degrés et une bruine fine leur rappelle qu'ils sont à peine en avril. Paris est à nouveau en noir et blanc. Seul le vert tendre des feuilles leur affirme que le printemps est là. Un joggeur solitaire a oublié d’actualiser sa page météo et court en short et tee-shirt.
La journée s’écoule doucement et soudain il est déjà temps de rentrer.
Place d’Italie, le périph puis l’A6… France Info débite son chapelet de nouvelles, souvent mauvaises… Vingt morts à Abidjan, un jeune homme s’est fait tabasser à Noisy-le-Sec, les résultats de Ligue 1…
Elle essaie de ne pas céder au vague à l’âme des dimanches soir. Elle ferme les  yeux et des images lui reviennent : la Porsche Cayenne coincée par un bus place de la Concorde (avez-vous déjà vu une voiture enroulée autour d’un réverbère ? C’est un spectacle insolite) ; cette charmante cour intérieure cachée, rue de Babylone ; les cerisiers à fleurs d’une place inconnue près du musée de Cluny…  Mari Chéri est au volant et la voiture glisse dans la nuit. Elle s'endort avec des images du Paris qu'elle aime, bercée par les commentaires du match Lens-Marseille.
C'était un beau week-end.

 

 

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